Le vampire Lestat, après un siècle à reposer tranquillement dans son caveau, décide de repartir à la chasse de nos jours. Grâce à ses talents de musicien, il devient une rock-star et avoue, au mépris du devoir de secret liant les vampires, sa nature impie au monde entier. Bien que les humains ne le croient pas, les autres vampires voient d'un très mauvais œil ces provocations...
Entretien avec un vampire (1994) de Neil Jordan, l'adaptation du célèbre romand'Anne Rice, a connu un très beau succès et a, en plus, acquis une excellenteréputation. La compagnie productrice, Warner Bros, décide de lui donner une suite. NeilJordan commence à y travailler, mais le résultat n'est pas jugé satisfaisant et il estécarté du projet. En 1998, le réalisateur australien Michael Rymer (qui s'étaitbeaucoup fait remarquer dans son pays avec son premier film Angel baby (1995))est sélectionné par les producteurs. Puis le travail d'adaptation commence : la WarnerBros ayant acquis les droits de plusieurs romans d'Anne Rice, ce film mêle des élémentsdes deux volets suivants de son fameux cycle vampirique : Lestat le vampire et Lareine des damnés. D'autre part, le budget de La reine des damnés est toutde même en baisse par rapport à son prédécesseur (35 millions de dollars contre 50).On ne retrouve pas les comédiens d'Entretien avec un vampire : les personnagesd'Armand (Antonio Banderas) et Louis (Brad Pitt) disparaissent, tandis que Tom Cruiserefuse de reprendre le rôle de Lestat. Ce rôle est interprété ici par le comédiend'origine irlandaise Stuart Townsend (Resurrection man (1998) de Marc Evans...).A ses côtés, on trouve Marguerite Moreau (la série de films pour enfants commencéeavec Les petits champions (1992)...) ; la jeune chanteuse Aaliyah (Roméodoit mourir (2000) avec Jet Li), qui devait décéder dans un accident d'avion avantla sortie du film, interprète la redoutable Reine des damnés ; l'acteur FrançaisVincent Perez (Cyrano de Bergerac (1990), The Crow, la cité des anges(1996)...) interprète le vampire Marius...
Ainsi, le script de La reine des damnés cherche à combiner en un même récitdes éléments de deux romans assez riches. Le résultat est pour le moins confus, etmême les amateurs les moins sévères d'Ann Rice ont dénoncé certaines trahisons.Recourant à des procédés risqués (le long flash back qui vient briser l'élan durécit), multipliant les personnages souvent sous-exploités (Tout ce qui tourne Jesse,qui devrait être, avec Lestat, un pôle très important de l'histoire, paraît expédié
- de même Marius ou Maharet ne font que des apparitions...). Le réveil d'Akasha semble
De plus, le personnage de Lestat, qu'on suit du début à la fin du métrage, est fortbien interprété par Stuart Townsend : il rend de façon tout à fait correctel'arrogance et le cynisme cruel de ce vampire. Si son charisme est moins direct que celuide Tom Cruise dans le même rôle, on peut néanmoins trouver que son jeu est pluséquilibré et un peu moins cabotin. La présence de Vincent Perez dans le rôle de Mariuspeut, a priori, inquiéter, mais il ne s'en tire plutôt correctement. Surtout Aaliyah acomposé une reine-vampire absolument irrésistible, d'une cruauté inouïe, mais aussid'une grâce et d'une beauté à tomber par terre. Sa simple présence suffit à apporterune intensité électrisante à toutes les séquences où elle apparaît.
On apprécie aussi la qualité de la direction artistique. Contrairement, à Entretienavec un vampire, La reine des damnés se déroule de nos jours et proposedonc une version contemporaine de la décoration gothique, dans laquelle les ornementsmacabres (moulages de visages hurlants, gargouilles...) se mêlent avec style à unetechnicité froide et métallique (le club, les appartements de Lestat...). Citons encored'autres magnifiques décors, comme le sanctuaire d'Akasha et la demeure de Marius.Toujours en ce qui concerne l'ambiance du film, on salue la musique fort réussie,notamment les chansons de Jonathan Davis (du groupe KoRn) qui proposent un Metal assezsombre, à la fois efficace et intransigeant, tout à fait en harmonie avec le proposassez noir de La reine des damnés. Le personnage de Lestat étant ici unmusicien de rock, le choix d'illustrer la plus grande part du film avec des chansons esttout à fait judicieux, et justifie d'ailleurs entièrement le traitement de certainesséquences dans un style inspiré des clips musicaux. D'ailleurs, en général laréalisation est plutôt soigné, bien qu'un peu trop hétéroclite, comme son scénario.On repère des scènes admirables : la vidéo inspirée par Le cabinet du docteurCaligari, le concert, la visite d'Akasha dans le club, la plage jonchée des cadavresayant servi à la nourrir, son destin final ...
Si La reine des damnés est loin de retrouver la rigueur et la subtilité d'Entretienavec un vampire, il n'en reste pas moins un film de vampires assez agréable. Lesujet y est traité avec sérieux, les interprètes proposent des vampires plutôtconvaincants, et on y trouve quantité de dentiers proéminents, de suceurs de sanginquiétants et de séquences horrifiques (encore une fois, la visite d'Akasha au club desvampires est saisissante), le tout baigné dans une atmosphère assez travaillée. Si lastructure de l'ensemble est confuse et inégale, elle n'en est pas moins jamais vraimentennuyeuse. Malgré tout, la sortie aux USA de La reine des damnés s'est soldépar des résultats commerciaux un peu décevants.
Bibliographie consultée :